mardi 23 avril 2024

Magie
















Tu es entré dans ma vie presque par effraction,
homme des dunes, dans mon pays d’hiver et de pluies.
Suis-je pour toi ce « repos du guerrier » pendant ta longue absence aux tiens ?

Tu es entré chez moi,
tu y as pris tes marques,
comme si tu étais chez toi.

Tu as pris part, ta part, homme fier, aux soins du ménage !
Comment résister à tant de gentillesse, de douceur.
Mon chez moi est devenu chez nous.
Le temps d’un miracle, un intermède...
J’ai mis des clefs et des serrures à mon cœur, à mon corps,
cadenassé mes yeux pour qu’ils restent secs,
croisé les jambes et les bras pour t’interdire l’accès à ma fragilité.

Tu es entré en moi, et mes barrages se sont brisés,
mes digues se sont rompues.
Tu m’as enveloppé de tes jambes, de tes baisers, 
et fait jaillir de moi un plaisir que je pensais définitivement oublié.
Au petit matin, ma peau s’est teintée d’indigo.

Tu me vois, enfin j'existe, du moins je l'espère.
Tu restes… un peu.
Quelques jours de magie, 
enlacés comme des enfants, à chaque retrouvaille, 
incapables de nous séparer,
baisers encore, tes cheveux sous mes lèvres, 
tendresse-peignoir aux coussins doux du canapé.

Tu pars. Je ne m’étiolerai pas à attendre ton retour.
La magie serait absente, comme de ces pays que l’on ne veut plus visiter, de peur d’être déçu.

S’attacher, s’arracher, ne pas ramollir l’homme des lointains.
Tu restes impassible, regard au loin sur le quai de la gare, je sens ta nuque vibrer de l’impatience de te retourner, mais non.
 
Rentrée chez moi, je hume ce parfum de thé sucré que ton corps exhalait, parfum de palmeraies, de dattes et de métal, parfum de poussières argentées des bijoux que tu fabriquais. 
 
Allongée seule cette fois dans le divan moelleux, ton image déjà s'estompe.
 
 



Texte et photo : Mona Mac Dee
2019



mercredi 17 avril 2024

Je vous emmène en balade: Flandre-Wallonie-Bruxelles: Un pays Yin et Yang.



Jardin de ma fille
Il n’est besoin de partir bien loin pour s’emplir les yeux de beauté. petit pays à la superficie  d’environ 30.000 km2, 60 km de côtes à tout casser, un majestueux estuaire, celui de l’Escaut, et les innombrables rus, cours d’eau, rivières, petits lacs et étangs du Nord. Sambre et Meuse au Sud, Lys, Semois, et là aussi, canaux et petits rus.

Un peu plus haut que la ligne Sambre et Meuse, mon Bruxelles qui, en comparaison de beaucoup de villes européennes, fait figure de grand village et pourtant : Dikkenek! ( vantarde!)
Au Nord entre St.Niklaas et Dendermonde 

( St.Nicolas et Termonde), le Waasland, baigné par l’Escaut, la Durme, la Oude Durme, la Dendre, entre autres, réminiscences des cours de géographie !
Dans ce Nord, on y parle le flamand, et pendant quelques jours, je suis partie à la découverte des 40 km2 de ce pays d’eau et d'étendues de maïs : où que l’on se tourne cette eau encore omniprésente, aux rives bordées de joncs, paradis des hérons et des oiseaux de toutes sortes.






Paysages très verts, à mes,yeux, très Yang et masculins ! Pays plat, rectiligne, rues tirées au cordeau, propreté méticuleuse passée à la Javel, cyclistes, regards rivés sur l’asphalte trop lisse des digues de la Durme, obnubilés par la vitesse, et tant pis pour nous, promeneuses solitaires.





Le regard porte loin, et parfois, au détour d’une courbe, un peu d’Irlande et de ses bruyères sous le vent violent et le fin crachin de ce mois d’Août 2020 tropical.


Pourtant, à en croire le symbolisme chinois, si je ne me réfère qu’au paysage, ce serait un pays -Yin-, mais l’impression générale, habitations, rues et habitants, me donnent cette sensation de force et de masculinité !                              
Je suis rentrée chez moi un peu soulagée, même si tout cela était particulièrement beau.




Je suis partie le lendemain vers le Sud, pas très loin, dans cette partie du pays appelée : Brabant Wallon, à moins de 35 km de Bruxelles. 



Paysage Yin, de l’eau aussi, des canaux, féminin tout en courbes sensuelles, champs dorés après la moisson, soleil couchant, rayons obliques et dorés jaillissant d’un ciel cependant menaçant et la douce solitude en haut du vallon.

premières amours: les rouilles!





Plus d'eau à l'écluse 28!




J’embrasse ce doux panorama,  voiture arrêtée, portière ouverte. Appuyée au capot, je reste là un moment, enveloppée de vent, de douceur, avec le ronronnement de l’éolienne qui brasse l’air à lents coups de pales.




Je n’ai pas envie de rentrer déjà, et je regagne mon chez moi par le chemin des écoliers : Feluy, Écaussines, Nivelles, Ronquières.




Comme souvent, depuis plus de 6 ans, je me ressource ici, marchant au long du vieux canal aux berges desquelles dorment toujours les mêmes péniches arrondies.





À chaque saison, un arbre, là au milieu d’une clairière, m’offre ses changements de costumes: il grandit, s’arrondit, s’étoffe, se colore, se dégarnit, et…je respire à pleins poumons.
 
 
Cet endroit m’est guérison et je ne ressens plus la pression imposée de cette étrange période.



Yin et Yang, masculin, féminin, mon pays si dur et si doux et presque en son centre, ma ville, difficile, sale, violente parfois, aimante aussi, douce quelquefois, multicolore surtout, où se bousculent accents et tenues, et où, revanche de mes amies musulmanes si critiquées, nous allons aujourd’hui, tous et toutes…masqué-e-s!



Waasmunster au long de la Durme


Texte et photos: Mona MacDee

samedi 6 avril 2024

La machine à se dénigrer... osons !

Hier, je regardais une vieille toile que j’avais déjà recouverte de « Gesso » ( médium qui sert à recouvrir une toile), et comme son fond était structuré, je me demandais ce que j’allais en faire ou si tout simplement je n’allais pas la mettre à la rue…
Puis je me suis dit :  « mais qu’est-ce que tu fais avec ces peintures, toi qui n’est qu’une autodidacte et même une dilettante, n’ayant jamais envie de suivre des cours, alors que tant d’autres ont sué sang et eau sur les bancs d’une académie ; qui es-tu pour prétendre vendre, qui sait, ces toiles ; et puis, tu n’as aucun style, tu passes d’une technique à une autre, ça ne ressemble à rien, on ne peut reconnaître, peut-être, ta « patte » qu’à la folie qui l’anime. »
J’en étais là de mes réflexions, prête à donner peintures et toiles au premier venu, découragée, car je ne valais, bien entendu, rien.
Je me suis alors posé cette question : qu’est-ce qui nous pousse ainsi à nous dénigrer, à vouloir ressembler aux autres, à abandonner la joie enfantine de s’amuser avec les couleurs, sinon une voix à l’intérieur qui nous dit sans cesse :  «  tu n’es pas assez, tu n’es jamais assez, tu n’atteindras jamais les sommets qu’on espérait pour toi ni ceux que tu penses te devoir à toi-même ! »
Ces voix ne s’éteignent jamais tout à fait, même après des thérapies. On pense les avoir semées, mais elles se manifestent quand on s’y attend le moins.
Aussi, que nous soyons cuisinière, musicienne, peintre, écrivaine, photographe, que nous nous occupions avec tendresse de notre jardin, ou de faire notre ménage, ou de nos enfants, de notre animal de compagnie, il y a là mille manières de « créer », de s’amuser sans vouloir exister aux yeux des autres. Montrer ce que l’on fait ? Oui, pourquoi pas, bien sûr, en parler car il y a une fierté à faire ce que l’on aime faire, mais sans jamais se comparer à l’aune imposée par la société.
Nous sommes nous, telles que nous sommes, dignes de tendresse, d’affection, d’amour pour qui nous sommes et non  pour ce que nous faisons.
Osons donc colorier en dehors des lignes, plonger les mains dans la pâte, la peinture ou la terre et faisons en surgir cette chose unique qui provient du plus profond de l’enfant qui chante encore en nous. 


Texte et acrylique : Mona MacDee

2020

lundi 1 avril 2024

Insoumise. Recueil 2017



 

 

 

 

 

Ils sont venus, chacals, s’abreuver à ma source de tendresse,
aux eaux profondes et maternelles
et je n’ai rien vu venir.
Je n’ai ni murs, ni clôtures,
aucune protection,
ni clefs, ni serrures,
ni grilles autour du cœur.
Étale et lisse,
si confiante à chaque fois,
je les ai laissés me ternir.
Ils n’ont vu de moi qu’un corps où assouvir leurs désirs.
Ils n’ont pas voulu de mes sourires,
ni de mes partages,
ni de mes idées, ni de mes rêves,
ni de mes besoins,
ni de balades tranquilles, main dans la main,
ni de mes baisers doux et de sommeils tendres.
Ils ont usé de moi, à leur guise,
et je n’ai pas su dire non,
pleine de larmes d’humiliation
et de colères rentrées.
J’espérais qu’ils voient au-delà,
et m’aiment telle que j’étais.
Ils n’ont ni vu, ni compris mes angoisses,
alors que je faisais miennes les leurs,
et que leurs vies me devenaient plus précieuses
que la mienne.
Je les ai laissés me dévorer
jusqu’à des lambeaux d’âme.

Fatiguée à me laisser glisser au sol, insoumise et fière,
je les toise.

J’ouvre mes ailes au vent du large,
pour que de ses embruns,
il me lave et m’apaise,
goélette dansante,
caboteuse d’émotions,
frôleuse de tendresse,
berceuse d’illusion,
chanteuse de vague à l’âme,
et je n’accosterai plus aux rives empoisonnées de leurs délires.

 

 

 

Mona MacDee

Recueil 2017